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Remarque : par souci de temps, cet extrait a été raccourci.

 

Juste à ce moment, Alice éprouva une sensation très bizarre qui l’intrigua beaucoup jusqu’à ce qu’elle eût compris de quoi il s’agissait : elle recommençait à grandir. Sa première idée fut de se lever et de quitter la salle du Tribunal ; mais, à la réflexion, elle décida de rester où elle était, tant qu’il y aurait assez de place pour elle.                                                                             « Je voudrais bien que tu ne me serres pas comme cela, dit le Loir qui était assis à côté d’elle. C’est tout juste si je peux respirer.                                       

-Ce n’est pas ma faute, répondit Alice très humblement ; je suis en train de grandir.                               

– Tu n’as absolument pas le droit de grandir, du moins pas ici, affirma le Loir.                                         

– Ne dites donc pas de bêtises, répliqua Alice plus hardiment. Vous savez bien que vous grandissez, vous

– Oui, mais moi, je grandis à une vitesse raisonnable, et pas de cette façon ridicule », fit observer le Loir. Sur ces mots, il se leva d’un air fort maussade, et alla s’installer à l’autre extrémité de la salle (…)

Alice regardait le Lapin Blanc chercher nerveusement le suivant sur sa liste, très curieuse de voir  qui pouvait bien être le  prochain témoin...  « Car, jusqu’à présent, ils n’ont pas beaucoup de preuves », se disait-elle.

Imaginez sa surprise, lorsque le Lapin Blanc cria très fort, de sa petite voix aiguë : « Alice ! »

«  Présente ! » répondit Alice. Elle était si troublée qu’elle en oublia combien elle avait grandi pendant les quelques dernières minutes, et elle se leva d’un bond, si brusquement qu’elle renversa le banc des jurés avec le bas

de sa jupe (…)

« Que savez-vous de cette affaire ? demanda le Roi à Alice.

– Rien.

– Absolument rien ? insista le Roi

– Absolument rien.

– Voilà une chose d’importance, déclara le Roi en se tournant vers les jurés.

Ceux-ci s’apprêtaient à écrire sur leur ardoise lorsque le Lapin Blanc intervint : « Votre Majesté a voulu dire :« sans importance », naturellement », dit-il d’un ton très respectueux, mais en fronçant les sourcils et en faisant des grimaces.

« Sans importance, naturellement, ai-je voulu dire », reprit vivement le Roi. Après quoi, il se mit à répéter à voix basse pour lui tout seul : « d’importance, sans importance, sans importance, d’importance », comme s’il essayait de trouver ce qui sonnait le mieux.

Certains jurés notèrent : « d’importance », et d’autres : « sans importance ».   (…)

À ce moment, le Roi, qui avait été pendant quelque temps fort occupé à griffonner sur son carnet, cria : « Silence ! » et se mit à lire à haute voix : « Article Quarante-Deux : Toute personne dépassant un kilomètre de haut doit quitter le Tribunal. »

Chacun regarda Alice. « Moi, je ne fais pas un kilomètre de haut, dit Alice.

– Si fait, affirma le Roi.

– Près de deux kilomètres, ajouta la Reine.

– De toute façon, je ne m’en irai pas, déclara Alice. D’ailleurs cet article ne fait pas partie du code : vous venez de l’inventer à l’instant.

– C’est l’article le plus ancien du code, dit le Roi.

– En ce cas, il devrait porter le Numéro Un », fit observer Alice.

Le Roi pâlit, et referma vivement son carnet.

« Délibérez pour rendre votre verdict, ordonna-t-il aux jurés d’une voix basse et tremblante.

– Plaise à Votre Majesté, il y a encore d’autres preuves à examiner, dit le Lapin Blanc en se levant d’un bond. On vient de trouver ce papier.

– Que contient-il ? demanda la Reine.

– Je ne l’ai pas encore ouvert, répondit le Lapin Blanc, mais cela ressemble à une lettre, écrite par le prisonnier à... quelqu’un.

– Cela doit être cela, dit le Roi. À moins que cette lettre n’ait été écrite à personne, ce qui est plutôt rare, comme vous le savez.

– À qui est-elle adressée ? demanda l’un des jurés.

– Elle n’est adressée à personne, répondit le Lapin Blanc. En fait, il n’y a rien d’écrit à l’extérieur. »

Il déplia le papier tout en parlant, puis il ajouta : « Après tout, ce n’est pas une lettre ; c’est une pièce de vers.

– Ces vers sont-ils de la main du prisonnier ? demanda un autre juré.

– Non, répondit le Lapin Blanc ; et c’est bien ce qu’il y a de plus bizarre. (Tous les jurés prirent un air déconcerté.)

– Il a dû imiter l’écriture de quelqu’un, dit le Roi. (À ces mots, le visage des jurés se dérida.)

Plaise à Votre Majesté, déclara le Valet de Cœur, je n’ai pas écrit ces vers, et personne ne peut prouver que je

les ai écrits : ils ne sont pas signés.

Si vous ne les avez pas signés, rétorqua le Roi, alors cela ne fait qu’aggraver votre cas. Si vous n’aviez pas eu de mauvaises intentions, vous auriez signé de votre nom, comme un honnête homme. »

À ces mots, tout le monde se mit à applaudir, car c’était la seule chose vraiment intelligente que le Roi eût dite depuis le début de la journée.                    « Cela prouve formellement sa culpabilité, déclara la Reine.

– Cela ne prouve rien du tout ! s’exclama Alice. Allons donc ! vous ne savez même pas de quoi il est question dans ces vers !

– Lisez-les », ordonna le Roi.

(…)

« C’est la preuve la plus importante que nous ayons eue jusqu’ici, dit le Roi, en se frottant les mains. En conséquence, que le jury...

S’il y a un seul juré capable d’expliquer ces vers, déclara Alice (elle avait tellement grandi au cours des quelques dernières minutes qu’elle n’avait pas du tout peur d’interrompre le Roi), je lui donnerai une pièce de dix sous. À mon avis, ils n’ont absolument aucun sens. »

Tous les jurés écrivirent sur leurs ardoises : « À son avis, ils n’ont absolument aucun sens » mais nul d’entre eux n’essaya d’expliquer les vers.

S’ils n’ont aucun sens, dit le Roi, cela nous évite beaucoup de mal, car nous n’avons pas besoin d’en chercher un... Et pourtant, je me demande

si c’est vrai, continua-t-il, en étalant la feuille de papier sur ses genoux et en lisant les vers d’un œil ; il me semble qu’ils veulent dire quelque chose, après tout...

(le roi tente d’expliquer les vers : cela ne donne aucun sens)

(…)

« Que les jurés délibèrent pour rendre leur verdict, ordonna le Roi pour la vingtième fois de la journée.

– Non, non ! s’écria la Reine. La condamnation d’abord, la délibération ensuite.

– C’est stupide ! protesta Alice d’une voix forte. En voilà une idée !

– Taisez-vous ! ordonna la Reine, pourpre de fureur.

– Je ne me tairai pas ! répliqua Alice.

– Qu’on lui coupe la tête ! » hurla la Reine de toutes ses forces.

Personne ne bougea.

« Qui fait attention à vous ? demanda Alice (qui avait maintenant retrouvé sa taille normale). Vous n’êtes qu’un

jeu de cartes ! »

À ces mots, toutes les cartes montèrent dans l’air et lui retombèrent dessus. Elle poussa un petit cri de colère et de frayeur, essaya de les repousser avec ses mains, et se retrouva couchée sur le talus, la tête sur les genoux de sa sœur qui enlevait doucement de son visage quelques feuilles mortes tombées des arbres.

« Alice, ma chérie, réveille-toi ! lui dit sa sœur. Comme tu as dormi longtemps !

– Oh, quel rêve bizarre je viens de faire ! s’exclama Alice.

Et elle se mit à raconter, autant qu’elle pouvait se les rappeler, toutes les étranges Aventures que vous venez de lire.

Lorsqu’elle eut fini, sa sœur l’embrassa et dit : « C’était un rêve vraiment très bizarre, ma chérie ; mais, à présent, rentre vite à la maison pour prendre ton thé ; il commence à se faire tard. »

Alice se leva et s’en alla en courant, tout en réfléchissant de son mieux au rêve merveilleux qu’elle venait de faire.

Mais sa sœur resta assise sans bouger à l’endroit où sa cadette l’avait laissée, la tête appuyée sur une main, regardant le soleil se coucher, songeant à Alice et à ses merveilleuses Aventures, jusqu’à ce qu’elle aussi se mît à rêver tout éveillée. Et voici quel fut son rêve : D’abord elle rêva de la petite Alice. (…) elle crut entendre le timbre même de sa voix, et, tandis qu’elle écoutait, ou croyait écouter, il lui sembla voir s’agiter autour d’elle les créatures bizarres du rêve de sa petite sœur.

(…) Elle resta ainsi, les yeux fermés, croyant presque être au Pays des Merveilles, tout en sachant fort bien qu’il lui suffirait de les rouvrir pour retrouver la terne réalité. (…)

Finalement, elle se représenta cette même petite sœur devenue femme. Elle était certaine que, dans les années à venir, Alice garderait son cœur d’enfant, si aimant et si simple (…)

 

 

 

 

 

 

 

    Ce procès donné par la reine rouge car l'un de ses valets lui a volé ses tartes est le dernier évènement qu'Alice va vivre au pays des merveilles. C'est ici qu'elle va être pleinement métamorphosée. Elle se trouve ici en position de force sur les personnages : "elle recommençait à grandir". Cela offusque le loir : "tu n'as absolument pas le droit de grandir, du moins, pas ici" Cette phrase d'interdiction fait s'interroger le lecteur : alors qu'Alice vient d'effectuer une grande quête pour grandir, on le lui interdit ici. Cela est sûrement car le tribunal est un lieu de justice. En effet, Lewis Carroll effectue ici une critique de la justice, de part l'interdiction précédente, mais aussi avec les nombreuses allusions moqueuses au Roi, à la Reine et aux Jurés : "Voilà une chose d’importance, déclara le Roi en se tournant vers les jurés. Ceux-ci s’apprêtaient à écrire sur leur ardoise lorsque le Lapin Blanc intervint : « Votre Majesté a voulu dire : « sans importance », naturellement », dit-il. « Sans importance, naturellement, ai-je voulu dire », reprit vivement le Roi. Après quoi, il se mit à répéter à voix basse pour lui tout seul : « d’importance, sans importance, sans importance, d’importance », comme s’il essayait de trouver ce qui sonnait le mieux. Certains jurés notèrent : « d’importance », et d’autres : « sans importance ». Ce passage montre que le Roi ne sait plus ce qu'il dit et que les jurés se contentent de mettre ses paroles à l'écrit, sans réflexion. Cette critique est renforcée  par le passage :        "– Non, répondit le Lapin Blanc ; et c’est bien ce qu’il y a de plus bizarre. (Tous les jurés prirent un air déconcerté.)

– Il a dû imiter l’écriture de quelqu’un, dit le Roi. (À ces mots, le visage des jurés se dérida.)

Plaise à Votre Majesté, déclara le Valet de Cœur, je n’ai pas écrit ces vers, et personne ne peut prouver que je les ai écrits : ils ne sont pas signés.

Si vous ne les avez pas signés, rétorqua le Roi, alors cela ne fait qu’aggraver votre cas. Si vous n’aviez pas eu de  mauvaises intentions, vous auriez signé de votre nom, comme un honnête homme. »

À ces mots, tout le monde se mit à applaudir, car c’était la seule chose vraiment intelligente que le Roi eût dite depuis le début de la journée.

« Cela prouve formellement sa culpabilité, déclara la Reine." Le Roi accuse à tort le valet, qui n'a pas écrit le poème puisque, comme il le dit, il n'est pas signé. Mais le roi l'accuse alors de ne pas l'avoir signé et donc d'avoir de mauvaises intentions, alors qu'il n'a aucune preuve que ces vers viennent de l'accusé. La phrase "c'est la chose la plus intelligente que le roi ai dit de la journée" est de l'humour, car, le roi n'a rien dit d'intelligent, mais ce non-sens, donne l'impression que le Roi vient de dire une parole très intéressante, ce qui n'est pas le cas. De plus, la description du visage des jurés traduit bien leur manque d'esprit : ils ne font qu'écouter le roi, trouvant qu'il a raison, alors que lui même ne sait pas quoi faire et se sert de son pouvoir pour faire avancer les choses. La Reine, en disant "Cela prouve formellement sa culpabilité", n'arrange pas cette image dégradante de la justice, car le papier ne prouve rien, et encore moins la culpabilité du valet puisqu'il ne l'a pas écrit. L'inutilité des jurés est renforcée par "Tous les jurés écrivirent sur leurs ardoises : « À son avis, ils n’ont absolument aucun sens » mais nul d’entre eux n’essaya d’expliquer les vers." Ils se contentent ici d'écrire mais n'essayeraient d'expliquer ce qui se passe pour rien au monde, même pas de l'argent proposé par Alice, puisqu'ils n'en sont pas capables. Le roi dit alors : "S’ils n’ont aucun sens, dit le Roi, cela nous évite beaucoup de mal, car nous n’avons pas besoin d’en chercher un", ce qui exprime sa flemmardise et son manque d'intérêt par arpport au procès, tout comme "C’est la preuve la plus importante que nous ayons eue jusqu’ici, dit le Roi, en se frottant les mains. En conséquence, que le jury..." Le papier n'étant pas une preuve, le Roi ne peut demander la délibération du jury, le procès ne pouvant pas être clos. Encore une fois, le Roi se sert de son pouvoir. 

    C'est durant ce procès qu'Alice reprend sa taille normale, elle semble enfin comprendre qu'elle grandit, comme lorsqu'elle explique au loir : "Vous savez bien que vous grandissez, vous aussi", ce qu'elle semble expliquer comme un fait tout à fait naturel, alors qu'elle a été si perturbée pendant tout le récit. Ce à quoi le loir rétorque : "Oui, mais moi, je grandis à une vitesse raisonnable, et pas de cette façon ridicule" ce qui montre qu'Alice grandit et reprend sa taille réelle d'un coup, comme si elle avait eur une prise de conscience soudaine de qui elle est. Cela est renforcé lorsque le lapin crie son prénom "Alice !" et qu'elle dit "Présente !" : à l'ouïe de son prénom, elle se reconnaît immédiatement, même si cela a toujours été le cas. Cette apostrophe suivie de son exclamation montrent bien qu'elle sait vraiment qui elle est. La fillette prend alors conscience de l'absurdité du procès lorsqu'elle contredit le Roi dans ce passage : "« Article Quarante-Deux : Toute personne dépassant un kilomètre de haut doit quitter le Tribunal. (...)Moi, je ne fais pas un kilomètre de haut. Si fait, affirma le Roi.

– Près de deux kilomètres, ajouta la Reine.

-De toute façon, je ne m’en irai pas. D’ailleurs cet article ne fait pas partie du code : vous venez de l’inventer à l’instant.

– C’est l’article le plus ancien du code, dit le Roi.

– En ce cas, il devrait porter le Numéro Un », fit observer Alice. Les hyperboles que le Roi et la Reine font sur sa taille traduisent que les personnages du pays des merveilles sont petit. La fillette est donc supérieure maintenant, car elle sait qui elle est. Alice n'a pas peur de contredire le Roi, pourtant associé au pouvoir absolu, et se rebelle, elle prend conscience de l'absurdité de ce passage, associée à l'onirisme. Elle est supérieure au Roi et se donne encore le droit de le contredire : "Cela ne prouve rien du tout ! Allons donc ! vous ne savez même pas de quoi il est question dans ces vers !" Elle l'interrompt pour essayer de faire réagir les autres personnages à l'absurdité de la situation : "S’il y a un seul juré capable d’expliquer ces vers, déclara Alice (elle avait tellement grandi au cours des quelques dernières minutes qu’elle n’avait pas du tout peur d’interrompre le Roi), je lui donnerai une pièce de dix sous. À mon avis, ils n’ont absolument aucun sens. » 

Elle s'énerve de plus en plus lorsque la Reine dit qu'il faut d'abord punir le valet puis écouter la délibération du jury, ce qui n'a absolument aucun sens :

"– C’est stupide ! protesta Alice d’une voix forte. En voilà une idée !

– Taisez-vous ! ordonna la Reine, pourpre de fureur.

– Je ne me tairai pas ! répliqua Alice.

– Qu’on lui coupe la tête ! » hurla la Reine de toutes ses forces.

Personne ne bougea. Qui fait attention à vous ? demanda Alice (qui avait maintenant retrouvé sa taille normale). Vous n’êtes qu’un

jeu de cartes ! » Les exclamations "C'est stupide", "En voilà une idée !" et "Vous n'êtes qu'un jeu de cartes" ainsi que la question rhétorique "Qui fait attention à vous ?" montre bien qu'elle comprend que ce procès n'a rien de correct, qu'elle a gagné une certaine maturité, car elle comprend l'absurdité de la situation de justice, qui est normalement associée à quelque chose de difficile. Le fait qu'elle ait retrouvé sa taille normale à ce moment la traduit la fin de sa quête. L'impératif donné par la Reine, qu'Alice n'écoute pas, ainsi que les verbes de dispute et de colère montrent qu'elle est supérieure même sur le pouvoir absolu du pays des merveilles, elle comprend que le personnel de la reine n'est "qu'un jeu de cartes". La fillette a donc une prise de conscience identitaire. C'est seulement à ce moment qu'on apprend véritablement qu'elle était en train rêver :"Oh, quel rêve bizarre je viens de faire ! s’exclama Alice." La fin montre au lecteur que ce monde onirique n'est accessible qu'aux enfants : "Elle (la soeur d'Alice) resta ainsi, les yeux fermés, croyant presque être au Pays des Merveilles, tout en sachant fort bien qu’il lui suffirait de les rouvrir pour retrouver la terne réalité." Sa soeur est plus grande qu'elle, elle sait que tout cela est irréel et ne peut rêver comme un enfant. Le pays des merveilles n'est alors accessible qu'aux enfants afin qu'ils réalisent leur quête identitaire. Malgré cela, Alice gardera toujours une âme d'enfant selon sa soeur : "Finalement, elle se représenta cette même petite sœur devenue femme. Elle était certaine que, dans les années à venir, Alice garderait son cœur d’enfant, si aimant et si simple".

Cette phrase marque la fin de la quête d'Alice : elle se dirige vers l'âge adulte, maintenant qu'elle sait qui elle est. Mais elle gardera un coeur enfantin, peut-être grâce à son passage par le pays des merveilles ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette scène est la scène où Alice se découvre. Elle se déroule dans un lieu avec présence d'eau au dernier plan. Cet élément a un rôle symbolique de renouveau, ce qui correspond à la quête d'Alice : la renaissance d'elle-même car elle découvre à ce moment là qu'elle est bien LA Alice. Elle a donc trouvé son identité. La jeune femme pleure car elle ne sait plus si elle doit aller affronter le Jabberwocky ou pas. Absolem, qui est présent, en train de faire son cocon, lui dit : « Aucune épreuve n’a jamais été surmontée en versant des larmes » ; Il prend alors un rôle similaire a celui d'un parent qui console son enfant. Il représente encore une fois les adultes, la sagesse. C'est un conseil, une invitation à la persévérance pour l'aider a grandir, à la faire devenir LA Alice. Leur rencontre ressemble à la première, Alice l'appelant : "Absolem ?" mais, malgré cette similitude, la rencontre est tout à fait différente ici : Par naïveté , la jeune fille lui demande pour quelle raison il « [a] la tête en bas ». Absolem est face à Alice et légèrement plus haut qu'elle, ce qui montre qu'il a encore quelquechose à lui enseigner : son identité. Contrairement à leur première rencontre, la place d'Absolem se rapproche plus du niveau du visage d'Alice, ce qui montre que le savoir sur son identité est presque partagé.  Il continue en expliquant qu'il « arrive à la fin de cette vie », Il va revêtir sa forme finale et devenir un papillon. On voit ici que la chenille se métamorphose en même temps qu'Alice : lorsque celle-ci est sur le point de comprendre qui elle est, celui-ci est en train de construire ce qui l'aidera à devenir un papillon. D'ailleurs, à la toute fin, alors qu'Alice est rentrée dans son monde et qu'elle a décidé de reprendre le commerce entreprit par son père, on revoit Absolem, en papillon bleu, qui vient voleter près d'elle alors qu'elle est sur un grand navire. Ils sont à ce moment tous deux métamorphosés et libres. Alice demande alors de l'aide à la chenille : "j'ai besoin de votre aide je ne sais pas quoi faire". La créature rétorque à sa demande d'aide « comment pourrais-je t’aider si tu ne sais même pas qui tu es petite sotte ». C'est la question identitaire qui, depuis le début du film, revient encore et toujours. Alice enchaîne de façon énervée en se présentant et en présentant sa généalogie. C'est la première touche d'assurance que l'on voit en elle; ce qui montre son évolution : "je ne suis pas une petite sotte, je m’appelle Alice Kingsley, je vis à londres, j’ai une mère qui s’appelle Hélène et une sœur prénommée Margaret. Mon père était Charles Kingsley et il avait une imagination qui ne tolérait aucune frontière et rien ne l’a jamais arrêté. Je suis sa fille, c’est moi Alice Kingsley." Alice dévoile son identité. L'affirmation "je suis sa fille" exprime son assurance face à son identité. Absolem dit « Alice, nous y voilà ». Les gros plan sur "Je suis sa fille" et "nous y voilà" montrent ces moments sont particulièrement importants : c'est la révélation. C'est un aboutissement dans la quête d'Alice, elle sait enfin qui elle est. La chenille continue en faisant référence à « la première fois [qu'elle est] venue », ce qui montre qu'elle est déjà venue, en rêve comme elle le pense, et qu'Absolem s'en souvient. S'en suit un flash-back  dans lequel la première venue de Alice (enfant) est résumée grâce à des fondus enchaînés qui montrent les actions passée d'Alice, qui ressemblent étrangement à l'oeuvre littéraire, avec une horloge, qui symbolise le temps qui passe. Alice est alors la Alice de l'oeuvre originale mais grandie : elle revient au pays des merveilles car elle ne sait plus qui elle est ni ce qu'elle doit faire afin de trouver de l'aide comme, plus petite, lors de sa quête identitaire "naturelle". Alice enchaîne rapidement par « ce n’était pas du tout un rêve puisque je m’en souviens ! Alors ce pays existe ! » Alice prend alors conscience qu’elle n’est pas en train de rêver, et que depuis le début elle se trompe. Un gros plan est inséré ici pour mieux montrer les émotions d'Alice, tout comme au début du passage lorsqu'elle pleure. Elle est ici heureuse, ce qui crée une opposition avec le début, où elle pleurait. La chenille profite de cette révélation pour lui dire : "et le Jabberwocky aussi, n'oublie pas !". Il lui rappelle que le Jabberwocky existe bel et bien et que le pays a besoin d'elle. Il lui dit alors : "fiat felicia Alice", une expression latine qui signifie "Que les choses s'arrangent". Le latin traduit la sagesse d'Absolem. Cette expression se veut pleine d'espoir, comme pour souhaiter bonne chance à la jeune femme. La phrase "peut –être te reverrai-je dans une autre vie" fait référence à la fin du fim, où Alice métamorphosée et de retour dans son monde voit un papillon bleu (Absolem) qui vient voler près d'elle. 

 

 

 

 

On voit ensuite Alice se diriger vers le grand échiquier avec la reine blanche et tous les adjuvants de la quête. Tous se retrouvent face à la Reine rouge et ses cartes, ainsi que le Jabberwocky. 

 La bataille débute sur un échiquier géant, Alice est le champion de la reine blanche et le Jabberwocky celui de la Reine Rouge.

Alice, à la vue du monstre qui se rapproche, rendue inquiétante par un plan d'ensemble fixe, se confie au chapelier à voix basse. Cette intimité est représentée par des gros plans sur leurs visages. Elle dit : "c'est impossible", ce à quoi le Chapelier répond "seulement si tu crois que ça l'est". Cette phrase invite à la persévérance : si on croit en quelquechose, alors cela se réalisera/sera le cas. Alors Alice, comme le faisait son père, imagine six choses impossibles, qui parlent de sa quête au pays des merveilles. Ces choses paraissent impossibles, mais elles se sont pourtant passées. En imaginant tuer le Jabberwocky en mettant cette action dans la catégorie des choses impossibles qui se sont passées, elle y croit et donc elle le tuera. Le plan rapproché permet de voir Alice, et derrière elle toute l'armée de la Reine blanche. Mais, malgré que celle-ci semble rassurante, elle ne bouge pas, ce qui montre qu'Alice est véritablement seule. La dernière et sixième chose impossible qu'Alice imagine est « je tuerai le jabberwocky », elle est sûre d'elle, confiante. Elle croit qu'elle le tuera, donc il mourra, ce qui représente l'invitation à la persévérance que le Chapelier vient de lui faire. Le gros plan permet de voir sa détermination. Les contrechamps effectués entre Alice et le Jabberwocky permettent de montrer la confrontation. 

Ensuite les deux camps entrent en conflit pour régler leurs querelles également. Alice grimpe en haut d'une tour en ruine et livre un combat acharné contre le champion de la Reine Rouge. Durant la montée, le spectateur peut voir l'action depuis les yeux d'Alice, en point de vue interne, ce qui lui permet de ressentir sa peur. Il y a des alternations de points de vue internes et de plans d'ensemble, pour, une fois permettre au spectateur de vivre ce que vit Alice puisqu'il vivait la quête en même temps qu'elle, l'autre fois de rendre l'action plus impressionante. La contre plongée effectuée sur le monstre en point de vue interne ne fait qu'accentuer cette peur. Les gros plans et plans rapprochés poitrine filment les émotions d'Alice. 

Le plan d'ensemble effectué lorsqu'elle est arrivée en haut du bâtiment en ruines montre une Alice qui paraît minuscule face au Jabberwovky qui est immense. Cela est très impressionnant et renforce le sentiment de peur, car Alice paraît en situation de faiblesse.

Se retrouvant projetée dans les airs, elle crie « qu’on te coupe la tête ! », la réplique favorite de « la maudite grosse tête », et coupe la tête du monstre, c'est le coup fatal. Il meurt comme la Reine fait mourir tous ceux qu'elle tue, ce qui est un retournement de situation. Le plan est en contre plongée et rapproché, ce qui donne à Alice de la puissance, et donne de l'importance à l'action. Elle se retrouve au dessus de la bête, ceci lui donnant un avantage dans le combat. Au moment où elle lu tranche la tête, un coup de gong résonne comme une sentence. La tête de la créature roule jusqu'en bas de la tour, dévalant les marches qu'Alice vient de monter, ce qui traduit son accomplissement, les marches étant vues comme le passage la menant à la victoire. La tête arrive aux pieds de la Reine Rouge. La preuve de la réussite d'Alice arrive donc directement devant elle. L'impressionant plan d'ensemble précédent permet de voir le corps du Jabberwocky tomber, ce qui accentue la réussite des blancs. Mirana (la Reine Blanche) se retrouve alors victorieuse et récupère la couronne. Elle condamne sa sœur attachée à son valet et amant qui ne la supporte plus à l'exil dans les terres du néant pour l'éternité. Celle-ci se met alors dans une colère noire car ce dernier tente de la tuer pour ne pas avoir à la supporter. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour conclure,  Il est possible de dire que les deux héroïnes d'Alice dans chacune des oeuvres étudiées ont une quête différente. La Alice du livre effectue une quête identitaire qui peut se référer à la puberté, ce qui est un fait normal et naturel. La Alice de Tim Burton, quant à elle, est plus âgée et perdue, car elle se sent encore une petite fille de par son imagination débordante, mais la société veut faire d'elle une femme un peu trop vite en lui proposant le mariage. Son âge charnière est entre l'enfance et l'âge adulte, ce qui fait qu'elle ne sait pas où elle doit se placer. Sa quête va donc l'aider à choisir où aller. En tous les cas, elles ont besoin d'échapper au monde réel pour aller au pays des merveilles, un monde onirique et absurde, où les personnages sont fous. Ce sont eux qui vont l'aider à réaliser sa quête, car les personnes du monde réel ne peuvent le faire. Ici, la chenille, le chat, le chapelier, le lièvre de mars ainsi que d'autres personnages sont un fil conducteur qui guide Alice dans sa recherche d'identité. Ils symbolisent les adultes "réels" qui aident les enfants à grandir, mais leur dimension absurde et folle leur permet de mieux aider Alice, car les vrais adultent ne semblent pouvoir le faire.

Il est possible d'ouvrir cette réflexion à une autre question : En quoi le pays des merveilles est-il représentatif du monde réel sous des aspects différents ?

 

III/Dénouement

Conclusion

Gravure de John Tenniel pour le livre original (wikipedia)

Image issue du film de Tim Burton (Google images)

Gravure de John Tenniel pour le livre de Lewis Carroll (wikipedia)

© 2015 Lycée Elie Cartan

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